mardi 26 juillet 2011

Visite d’un camp de réfugiés

Depuis le démarrage des affrontements en Lybie, plusieurs camps de réfugiés ont été improvisés pas très loin de la frontière tuniso-lybienne, et notamment dans les régions de Ras Jdir et de Dh’hiba.

De ces camps de réfugiés, nous ne savons pas grand chose, juste des recensement de personnes entrées, de celles parties, et de celles qui restent. Je me suis donc dit, qu’il était normal, que j’aille jeter un coup d’œil.

Vu de loin, un camp de réfugiés est très sexy. A en croire cette photo, un camp ressemblerait à ça :

camp

Le seul bémol, c’est cette queue interminable, mais après tout, quand on est réfugié, qu’est ce qu’on peut avoir de mieux à faire ?

Vu de plus près, un camp, entre sable et poussière, le soleil et le vent, la réalité, est beaucoup plus dure : Se tenir debout au dehors est déjà un exploit.

camp2

A cela, s’ajoutent quelques petites mésaventures, entres désaccords et quiproquos, qui font qu’une tente Unicef qui faisait office d’école peut être incendiée et lacérée sans qu’on en parle, sans qu’on sache comment, pourquoi, quand… C’est peut être une fuite de gaz, ou le tournage d’un mauvais film.

Incendie

Dans un camp de réfugiés, sauf à essayer de parler avec tout le monde, mais vraiment tout le monde, on ne comprendra jamais rien. Mais entre la peur et la défiance, le sarcasme et l’ironie, il n’est pas facile de se faire une idée. Ce que j’en retiens, c’est le regard d’une réfugiée, qui de derrière la poussière est venue comme pour me dire “Je vais bien, ne t’en fait pas !”.

20110724_Refugiee


Toutes les photos n’ont pas été prises dans l’ordre où elles apparaissent ni par le même photographe. Aucune photo n’a été truquée.

mercredi 9 mars 2011

Pourquoi je n'aime pas Ennahdha

Ennahdha, c'est, en essence, un parti politique islamique. On dit de plus en plus que c'est un parti politique prônant un Islam modéré, un AKP tunisien, c'est juste un discours de circonstance.

Déjà, dire un parti politique, suppose, une adhésion aux règles du jeu des partis politiques, ces règles fussent elles justes ou injustes, n'est pas la question. Dans un jeu, on respecte d'abord les règles pour jouer, et ensuite, quand il y a consensus, on peut changer ces règles. Or dans les règles du jeu des partis politiques, il est expressément écrit :
"Un parti politique ne peut s'appuyer fondamentalement dans ses principes, activités et programmes sur une religion, une langue, une race, un sexe ou une région".
Dans cette même loi organique n°88-32 du 03 mai 1988 apparaît également :
"Le parti politique agit dans le cadre du respect de la constitution et de la loi :
  1. a) il doit dans son activité respecter et défendre notamment :
    • l'identité arabo-musulmane;
    • les droits de l'homme tels que déterminés par la constitution et les conventions internationales ratifiées par la Tunisie.
    • les acquis de la nation et notamment la forme républicaine du régime et ses fondements, le principe de la souveraineté populaire telle qu'elle est organisée par la constitution et les principes organisant le statut personnel.
  2. b) il doit en outre :
    • bannir la violence sous toutes ses formes ainsi que le fanatisme, le racisme et toutes autres formes de discrimination;
    • s'abstenir de toute activité de nature à porter atteinte à la sécurité nationale, à l'ordre public et aux droits et libertés d'autrui;"
Au risque de paraître stupide, je ne vois pas ce qu'on peut reprocher à cette loi. Mais, comme je le disais, ce n'est pas là la question.

Que M. R. Ghannouchi soit un cheikh, ou un Imam ou un super Musulman, c'est son droit le plus strict, et personne ne trouvera rien à y redire. Par contre, dire qu'Ennahdha est un parti islamique, me pose un problème.

Parce que, en substance, ça signifie 2 choses :
  1. Que les autres partis ne le sont pas, ce qui est déjà très grave,
  2. Que Ennahdha est habilité, je ne saurai vous dire par quel miracle, à dire, qui est musulman, parti ou individu, et qui ne l'est pas,
La manigance, est une supercherie visant à faire croire, que si on est musulman, il faut être un partisan d'Ennhadha et non de n'importe qu'elle autre parti politique, non pas parce que, ce que nous (Ennahdha) avons un programme crédible, utile, ou d'intérêt général comme se doit de l'être le programme d'un parti politique, mais simplement parce que nous (Ennahdha) nous somme l'Islam. Si tu es contre nous, tu es pour les bordels, l'immoralité, l'adultère, l'alcool, le ribè,...et la liste ne finit pas. Et tu es soit avec nous, soit avec le Diable.

Force est de constater que ce discours opportuniste jouant sur les amalgames pour se positionner en sauveur de la nation et de l'identité est, au mieux, une petitesse, une manière de tricher, pour mettre la main, qui, au bénéfice du doute, n'est pas très propre, sur la politique de ce pays.

Mon Islam et moi, il n'y a que moi que ça regarde. Vous voulez faire de la politique, commencez par faire de la politique !

vendredi 4 mars 2011

Les élections : B A BA

Tout le monde sait, que quand il y a des élections, tout le monde vote, et puis celui qui a le plus de voix gagne. Ce n'est pas tout à fait ça.

En matière d'élections, il y a vote direct et vote indirect.

Dans un vote direct, on parle aussi de suffrage universel, tous les citoyens disposant du droit de vote, votent. Le droit de voter suppose :
  1. avoir atteint 18 ans,
  2. être libre de voter, et donc, ne pas être en prison ou purgeant une peine avec sursis (c'est entre autres le pourquoi de la loi d'amnistie générale),
  3. ne pas être dépourvu du droit de voter. C'est typiquement le cas de l'armée, les juges et les magistrats, eux, peuvent voter mais ne peuvent pas adhérer à un parti,

Dans un vote indirect, ce ne sont pas les citoyens qui votent, mais des élus les représentant. Pour les lois, par exemple, les députés votent au nom du peuple.

Pour gagner une élection, il faut disposer de beaucoup de voix, d'une majorité. Ici aussi, plusieurs cas de figure sont possibles : Il y a la majorité relative, la majorité qualifiée et la majorité proportionnelle.

Dans la majorité relative, celui qui a le plus de voix gagne, peut importe, si c'est 99% des voix ou si c'est 10% des voix. Cette majorité est calculée par rapport au nombre de votants et non pas au nombre d'électeurs, même si, dans certains cas, on mentionne le nombre d'abstentions.

Dans la majorité qualifiée, on fixe un seuil. Très souvent c'est 50% ou 2/3. Ça signifie, que pour remporter de telles élections il faut atteindre ce seuil. C'est pourquoi, pour ce genre d'élections on a souvent un 1er tour et un 2ème tour entre uniquement 2 candidats. Les élections présidentielles en Tunisie, fonctionnent, en théorie, selon ce principe.

Dans la majorité proportionnelle, on passe par ce qu'on appelle des listes. Les électeurs ne votent pas pour un candidat, mais pour une liste de candidats, dont le nombre est égal au nombre de mandats cibles. Après le décompte, chaque liste, disposera de la même proportion de mandats, que la proportion de voix récoltées. Si, par exemple, les élections portent sur 20 sièges de députés pour Tunis, le parti qui a 50% des voix, disposera de 10 sièges. Sur la liste de 20 initialement candidate, ces 20, se réuniront pour élire, entre eux, les 10 qui prendront les 10 sièges. Les partis ayant moins de 5% des voix, devront former des coalitions pour pouvoir disposer d'assez de voix pour pouvoir prétendre à un siège.

Pour des élections, il y a aussi une étendue géographique, une circonscription. Quand on élit des députés à Sousse, les citoyens de Sfax ne participent pas. Même quand on élit un président on parle de circonscriptions électorales. Ces circonscriptions on d'abord un rôle logistique : on compte plus facilement des paquets de quelques milliers de voix que toutes les voix en même temps. Dans certains cas, ces circonscriptions ont aussi un rôle de synthèse. C'est par exemple les cas des élections présidentielles aux Etats-Unis, où, il passent par ce qu'ils appellent "Les grands électeurs" qui accordent au 2ème tour des élections présidentielles l'intégralité des voix d'un état au candidat ayant le plus de voix dans cet état.

mardi 1 mars 2011

Ben Ali : Qui était le contre pouvoir ?

Ben Ali a fui. Des voix continuent de demander le départ des appendices de l'ancien régime. C'est on ne peut plus légitime, du moment qu'on se met d'accord sur la désignation de ces appendices.

Un pouvoir, n'existe jamais sans contre-pouvoir. C'est nécessaire pour qu'un équilibre puisse perdurer. 23 ans de silence, ne sont pas un hasard, mais nécessairement la conséquence de complicités. Le contre pouvoir qui "freinait" l'appétit de Ben Ali est donc, toujours là. Et c'est l'appendice de l'ancien régime. Beaucoup pensent que c'est le gouvernement. Je ne le pense pas.

Le gouvernement du temps de Ben Ali était un instrument comme beaucoup d'autres. Le gouvernement n'avait aucun moyen de s'opposer à la volonté de Ben Ali, et pour le gouvernement, en termes de stratégie, la seule position intelligente était la soumission. Pour un ministre, s'opposer à Ben Ali, était comme une démission. Profiter des largesses de Ben Ali était donc la seule orientation intelligente à adopter. Il y a certainement dans les gouvernements successifs, beaucoup de corrompus, de pourris, de personnes qui se sont enrichies sur le dos du peuple. Je ne les cautionne pas. Je les comprends. Dans le clan des complices, ce ne sont pas les pires.

Ceux qui auraient dû s'opposer, c'est déjà l'opposition : les partis. Dans cette catégorie, on a les partis de façade et les partis interdits. Les partis de façade vivaient sous perfusions. En gros, leurs seules ressources, étaient ce que Ben Ali, voulait bien leur donner, dans le cadre de la participation à la promotion de la pluralité politique. Ils se devaient donc d'être dociles, pour exister. Et ils n'avaient pas les reins assez solides pour s'opposer. Leur complicité est flagrante, condamnable, mais compréhensible. Je ne pense pas que beaucoup auraient agis différemment. Le moins qu'on puisse dire du système du bâton et de la carotte, est qu'il fonctionne dans les pays tel que le notre.

Les partis interdits, on été coupés de leurs bases. On les a castrés et muselés ne leur laissant de la sorte, que la capacité, depuis l'exile, d'aboyer. "Le chien aboie, la caravane passe". Au mieux, ni opposants ni complices, ce n'est pas là non plus le contre-pouvoir au pouvoir de Ben Ali.

Il y a ensuite les "intellectuels". C'est une grosse partie de ce qu'on appelle "la société civile". C'est les associations de médecins, d'avocats, de magistrats, de diplômes des grandes écoles, des ingénieurs,... Ces groupuscules étaient exclusifs. Si tu n'est pas avocat, tu ne peux pas faire partie d'une association d'avocats. Ca limite l'assise populaire, et par voie de conséquence, la force de frappe, le pouvoir de négociation et d'opposition. Quand on a à faire à plus fort que soi, une sage position et d'être d'accord. Pour certains, cet accord a été instrumentalisé par la peur, pour d'autres par l'argent. Ils ont été complices, ne serait-ce que par leur silences, mais, dans un sens, ils n'avaient pas vraiment le choix de faire autrement. Je ne les cautionne pas, je les comprends

En dernier lieux, il devrait y avoir en toute logique les syndicats. Dans la catégorie syndicats, il y a deux principales forces : l'UTICA et l'UGTT.
L'UTICA est le syndicat des patrons. A sa tête, il y a eu depuis 1987 Hédi Djilani, dont la fille Zohra est l'épouse de Belhassen Trabelsi. Une autre de ses filles est l'épouse de Sofiane Ben Ali, fils de Moncef Ben Ali. Hédi Djilani est aussi, depuis 1989 membre du comité central du RCD et de la chambre des députés. Mettez un tel profil dans le pays le plus démocratique du monde. Est ce que vous pensez sérieusement qu'il peut être un opposant, ou ne serait-ce que développer une idéologie d'opposition ? On ne peut même pas l'accuser de complicité. Et puis, s'il est à la tête de l'UTICA, c'est que l'UTICA, et donc tous les patrons, y a un intérêt. Qui mieux que lui aurait pu défendre les intérêts des patrons en Tunisie contre une dérive de la surimposition ? Pour autant, les salariés du privés, en Tunisie, n'ont à ce jour pas fait de sit-in pour demander des contractualisations ou des augmentations. Cet homme, pouvait faire de tous les salariés des esclaves, surtout que, pour les salariés du secteur privé en Tunisie, l'affiliation syndicale n'est pas de mise, si tant est, qu'on suppose que besoin il y a. J'ai donc du mal à considérer que l'UTICA aurait été, ou pu être, un contre-pouvoir au régime de Ben Ali.

Dernier et non des moindres, l'UGTT. Déjà, ce qui est bien avec l'UGTT, c'est que du temps de Bourguiba, ils pouvaient mettre le feu au pays pour obtenir ce qu'ils voulaient. Ils ont souffert, mais n'ont jamais été contraint à se taire. Aussi, dans les entreprises publiques, comme dans toutes les administrations, l'affiliation à l'UGTT est quasi automatique. C'est la fameuse légitimité historique de l'UGTT. 517 000 membres (Chiffre UGTT) à 12 dinars/an ça fait déjà 6 millions de dinars. Ce n'est pas beaucoup, diront certains. C'est beaucoup plus que tous les partis d'opposition réunis.
L'UGTT, avec cette force de frappe, financière et humaine, a obtenu plusieurs acquis pour ses affiliés. Parmi ces acquis, on a par exemple, les cours particuliers que continuent à faire les instituteurs et les professeurs du secondaire en dépit d'une loi promulguée et qui les interdit. L'UGTT négocie aussi toutes les conventions collectives en vigueur dans ce pays, qu'elles touchent les salariés du public ou du privé.

Aussi, ceux qui travaillent dans les entreprises publiques, savent qu'il y a toujours, 2 personnes intouchables dans ces entreprises : M. RCD et M. UGTT. Ces personnes sont plus fortes que le PDG et peuvent le faire virer, et personne ne peut les contrarier. Or, c'est dans ces mêmes entreprises "publiques" qu'on a observé :
- Les dépassements des droits des travailleurs par rapport à la contractualisation des intérimaires/stagiaires et des injustices salariales,
- Les emplois fictifs pour des salariés invisibles et intouchables très généreusement payés,
- Les détournements de fonds et les abus de biens sociaux et de pouvoir,
- Les summums du népotisme et du favoritisme,

J'ai du mal à imaginer un M. UGTT ignorant de ce genre de dépassements dans son entreprise. J'ai aussi du mal, à voir, dans ces dépassements une philosophie de lutte syndicale. J'ai surtout du mal, à concevoir que l'UGTT a été incapable de lutter, de s'opposer et de dénoncer ce genre de pratiques, si on décide de croire qu'elle lutte exclusivement dans l'intérêt des travailleurs tunisiens.

A mon avis, si l'UGTT a choisi d'accepter de telles dérives, il faut surtout comprendre qu'elle a surtout choisi d'en profiter, gracieusement, pour ne pas dire, à les instaurer. C'est débattable et je ne porte pas d'accusations. Mais si ça devait être vrai, elle a donc, tout intérêt à défendre ses acquis et négocier son impunité. Soyons sincères : Si aujourd'hui tu reçois d'une entreprise où tu n'as jamais mis les pieds 1000 dinars chaque mois, tu ne voudrais surtout pas que ça cesse ! Si on commençait à défricher les dossier de corruptions et de malversations, tu ne voudrais surtout pas être poursuivi. Si en plus, comme beaucoup d'autres comme toi, tu es dans une organisation disposant des ressources nécessaire pour imposer ça, t'en priverais-tu ?

J'aurais été à la tête d'une telle organisation, mon réflexe aurait été de déstabiliser le pays jusqu'à ce qu'à ce qu'un gouvernement me promette continuité et impunité. On peut donc comprendre la position de l'UGTT de ne soutenir aucun gouvernement. On peut, dans la même logique, comprendre qu'une stratégie de l'UGTT puisse être de promouvoir l'anarchie, parce qu'on mettant le gouvernement sous pression, elle peut ainsi mieux négocier. Mais, ici, on comprends, et avec toute la vigueur du monde on condamne.

N'ayant pas les preuves nécessaires, je ne peux pas dire que c'est vrai. Ce ne sont que des hypothèses. Je constate juste, que de cette manière, beaucoup de choses s'expliquent. Ce n'est donc pas nécessairement faux, et tant qu'on n'a pas mieux, ça reste ce qui s'approche le plus de ce qu'on peut considérer comme vrai. C'est scientifique ;)

dimanche 27 février 2011

Une révolution de la dignité ?

Ca devait être une révolution de la dignité. Ca devait être une révolution contre le joug de l'injustice. Ca devait être une révolution pour que plus jamais un tunisien n'ait à subir l'injustice. On en est bien loin.

Ganouchi a été 1er ministre sous Ben Ali. Avons-nous pour autant le droit de le traiter comme un chien enragé ? Je veux bien croire qu'il puisse être accusé de ce qu'on voudra lui coller sur le dos. La dignité de l'Homme nécessite néanmoins la présomption d'innocence et le droit de se défendre.

Rappelons-nous quelques petits détails. Les 10 millions de tunisiens, ils étaient tous citoyens sous Ben Ali. Ben Ali, tirait sa légitimité des voix et des silences de ces 10 millions de citoyens. Donc, il ne faut pas aussi oublier que c'est 10 millions de présumés coupables. Car au final, la seule vraie victime c'est la Tunisie, et que du temps de Ben Ali, il n'y avait vraiment pas de quoi être fier à être tunisien.

Ceux qui demandaient la tête de Ganouchi, en quoi, sont ils différents de Ben Ali ? Ils parlent pour le peuple, comme le faisait Ben Ali. Ils décident au nom du peuple, comme le faisait Ben Ali. Ils ne représentent pas le peuple, tout comme Ben Ali. Ils vivent ce délire obscène où on a raison parce qu'on est d'accord avec soi-même, et qu'on a une horde d'imbéciles qui meugle haut et fort ce qu'elle ne comprends en le présentant comme la vérité vraie, tout comme la horde de Ben Ali. C'est juste les noms qui changent, la méthode est la même.

Tous les crimes commis par Ben Ali, n'ont pu à ce jour être établis dans un procès équitable, encore moins ceux de Ganouchi. Milosevic, qui a mené un génocide, a eu droit à un procès équitable. Saddam Hussein, celui qui a décimé des villages entiers au gaz est au moins aussi coupable que Ben Ali. Son semblant de procès a juste permis de débrider la barbarie dans une triste exécution qui restera dans l'histoire comme une page de honte pour chaque irakien. Est ce pour ça qu'on s'est révolté ? Est ce pour ça qu'on a payé par le sang ?

Dans ce pays, il y a beaucoup plus de coupables que de crimes. Ceux qui font le sit-in à la Kasbah, qu'il aillent faire un parti. L'UGTT, qu'elle aille se faire un congrès. Les avocats, qu'ils poursuivent les de facto désignés présumés coupables. Les étudiants, qu'ils aillent lire dans les bibliothèques c'est quoi une constitution, un régime parlementaire, une assemblée constituante,.... Les politiques, qu'ils aillent voir les citoyens, promouvoir leurs mouvances, convertir leurs adeptes. Personne ne fait ça, tout le monde brigue une chaise dans une république mourante victime du cancer de l'individualisme exacerbé et de la grippe de la bêtise.

Il y a mille et une manière de faire de ce pays une démocratie. Mais s'il y a une seule de ne pas y arriver : c'est que nous faisons maintenant.

mardi 22 février 2011

Hypothèse d'un complot ou quand démocratie rime avec "La fin justifie les moyens"

J'ai analysé dans un précédent post les demandes des acteurs du nouveau sit-in de La Kasbah. Ceci m'a amené à me demander qui pourrait y gagner. Ceci est juste l'hypothèse d'un complot.

En France, les élus président de la république, députés et maires, le sont à la majorité qualifiée. Ca signifie, que si, aucun candidat ne dispose de 50% des voix, un 2ème tour est organisé pour élire un candidat à la majorité qualifiée. Ca assure la domination de 2 partis dans un paysage bipolaire où les partis les partis d'extrême droite et d'extrême gauche, qui ne font pas l'unanimité des français accèdent difficilement aux principales institutions de la démocratie.

En Italie, les députés sont élus à la proportionnelle. Ca signifie, que si par exemple, un petit parti dans une région récolte 10% des voix, il aura 10% des sièges de la région. Ca permet aux petits partis d'être à la chambre des députés. Ca oblige aussi a tenir compte de ces partis pour former des coalitions. C'est ce qui permet à M. Silvio Berlusconi, d'être chef du gouvernement sans qu'il ait été directement élu, et vaut à l'Italie un nombre de partis beaucoup plus grand que tous ces voisins européens.

En Tunisie, c'est un peu comme en Italie. Le président de la république est élu au suffrage universel et à la majorité absolue (1er et 2ème tour s'il faut). Les autres élus passent par des listes, par une élection à la proportionnelle rectifiée, qui fait que l'élu peut être un parfait inconnu pour les électeurs, il a juste besoin de bénéficier de l'approbation du parti qui a récolté le plus de voix : le RCD. Cette manière de faire, a permis au RCD de nommer ses élus parlementaires en toutes légalité, et avec la légitimité du vote. Ce mode de fonctionnement a été mis en place sous Ben Ali.

Si on considère un parti qui sait pertinemment, que son idéologie ne lui permettra jamais de dépasser les 10% voix dans chaque élection à laquelle il se porterait candidat, il profiterait beaucoup de ce que les élections législatives, par exemple, soient à la proportionnelle, puisqu'il se garantit ainsi, des sièges de député, une place au gouvernement et un revenu beaucoup plus confortable que dans un cas contraire. On se retrouverait, au parlement, avec plusieurs partis ne disposant pas de la majorité nécessaire pour gouverner. Les coalitions auront plus de couleurs que l'arc en ciel, et la vie politique sera une interminable série de crises politiques, de dissolutions du parlement, de démissions, d'élections,... Il y aura toujours quelqu'un pour dire que de la sorte on aura une meilleure représentation du peuple. C'est tout un débat.

Je ne pense pas que cette hypothèse soit complètement farfelue. Et je ne condamne pas d'emblée un tel scénario. Ce que je condamne, c'est qu'on essaie d'y arriver en se faisant passer pour patriotes révolutionnaires, par la tromperie la duperie de ceux à qui on ne dit que ce qu'ils ont besoin de savoir, et qu'on se permette de prendre un pays en otage pour y arriver. Ce n'est pas le bon moment. Ce n'est pas la bonne manière non plus.

Le sit-in à la Kasbah en V2

Depuis hier, on a un nouveau sit-in à la Kasbah. Les exigences, sont présentées comme étant dans la continuité de la révolution. Parmi ces exigences, il y a notamment :
- La démission du gouvernement,
- Dissolution de la chambre des députés,
- Dissolution de la chambre des conseillers,
- La création d'une assemblée constituante,
- L'instauration d'un régime parlementaire,

Pour la démission du gouvernement actuel, j'avoue ne pas voir ce qu'elle peut apporter de bon, si ce n'est, enfoncer encore plus le pays dans l'anarchie. On commence à peine à retrouver une vie normale, une sécurité. Et puis, qui le remplacerait ?

Pour la dissolution des 2 chambres, il n'y a personne qui dispose de ce pouvoir, qui habituellement est détenu par le président de la république élu. Le président de la république par intérim dispose de toutes les prérogatives d'un président élu, à l'exception, principalement, du droit de dissoudre le parlement et de modifier la constitution.

Aussi, la chambre des députés, comme la chambre des conseillers, ont délégué l'ensemble de leur pouvoirs au président de la république par intérim, M. Fouad Mbazaa. Ce qui signifie, qu'ils ne sont ne sont pas en meure de faire quoi que ce soit. Ils gardent néanmoins une utilité : La personne qui viendrait à remplacer M. Fouad Mbazaa à la présidence de la république, aura besoin de la même délégation de pouvoirs faite à M. Fouad Mbazaa par les 2 chambres pour pouvoir promulguer des lois,

Pour ce qui est de l'assemblée constituante demandée, et présentée comme la réplique de celle ayant écrit la constitution de 1959, le parallèle suivant me semble utile :
- L'AC qui a écrit la constitution de 1959 sur décision du Président Habib Bourguiba, une année a été nécessaire pour l'organisation de l'élection de ces membres,
- L'AC qui est demandée aujourd'hui verrait siéger tous les représentants de tous les partis, de la société civile, des "protecteurs de la révolution", sur base de désignations !

- L'AC qui a été élue en 1957 avait mis 2 ans pour faire son travail,
- L'AC qui est demandée aujourd'hui, devrait en toute logique prendre le même temps,

Le plus important, c'est que, comme personne ne dispose du droit de modifier la constitution actuelle, elle devra être, suspendue, puis abrogée. Hors, de la sorte toutes les lois actuellement en vigueur, seront simplement sans fondement : On n'a plus, par exemple, à payer ses impôts parce qu'actuellement en les paie conformément aux disposition de l'article 16 de la constitution . Le meilleur, c'est que, tous nos acquis, en laïcité, code du statut personnel, conventions internationales ratifiées,... reviennent au stade du possible, de l'optionnel, de l'envisageable.

Dernier point, le régime parlementaire. En réalité, c'est la seule demande. Les autres ne feront qu'ouvrir le chemin au passage vers un régime parlementaire, en précipitant une république qui n'arrive pas à retrouver l'usage de ses institutions dans le coma. Sur le fond, que le régime tunisien, soit présidentiel ou parlementaire, parlementaire moniste ou parlementaire dualiste est une question importante. Il n'en demeure pas moins, que le plus urgent aujourd'hui, c'est de d'assurer la continuité de l'état et de lui retrouver une légitimité. La rupture n'est pas un moindre mal, mais un saut dans l'inconnu. Rien n'empêche aujourd'hui les futurs candidats à la présidence de défendre tel ou tel changement de régime, et de le mettre en place après les élections.

L'urgence n'est pas là. A qui cela profiterait ?

Le curseur de la laïcité

Dit simplement, la laïcité, c'est la séparation entre l'état et la religion, pour que, chaque citoyen soit libre de sa croyance, et donc du degré de cette croyance. Le degré de cette séparation est différent dans chaque pays, notamment pour des raisons historiques.

En France, par exemple, la 1er article de la constitution définit :
La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elleassure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.
La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales.

Le gouvernement n'a pas, par exemple, un ministère des affaires religieuses. Par contre, le président de la république française est, en vertu de cette même constitution chanoine, ce qui, dit simplement, signifie qu'il est attaché au service d'une église. Toujours, dans cette même laïcité, le port de signes ostentatoires d'appartenance religieuse est interdit par la loi. Ce qui permet d'interdire le port du voile, mais n'interdit pas, le port du crucifix ou de la croix gammée en pendentif.

Les états unis sont aussi un pays laïque. Les billets sont estampés d'un "In God we trust". Georges W. Bush terminait toutes ses allocutions par un "God bless America" quand il menait une lutte du bien contre le diable "Evil". Il n'en demeure pas moins, que des religions telle que la scientologie, ou des populations comme les mormons, sont parfaitement libres de l'exercice de leur religion, de sa promotion et du recrutement de nouveaux adeptes.
La laïcité, c'est en fin de compte, un curseur que chaque pays positionne à une position qui lui est propre.

Le cas de la Tunisie est particulièrement intéressant. Comme pays laïque, notre constitution stipule que la religion de la république est l'Islam, que le président est nécessairement musulman. Notre gouvernement inclut un ministère des affaires religieuses qui finance et encadre les imams. Nous avons aussi des maisons closes. Le commerce de l'alcool est, pour le moins, florissant. Et certaines de nos lois sont en complète contradiction avec l'Islam, par exemple, pour ce qui est du droit de la fille unique d'hériter tout le patrimoine de ses parents. La même constitution écrit :
La république tunisienne garantit l'inviolabilité de la personne humaine et la liberté de conscience, et protège le libre exercice des cultes, sous réserve qu'il ne trouble pas l'ordre public.
On y retrouve aussi :
Un parti politique ne peut s'appuyer fondamentalement dans ses principes, objectifs, activité ou programme sur une religion, une langue, une race, un sexe ou une région.
Nous avons cette laïcité en héritage depuis 1956. Nous pouvons néanmoins la remettre en question. On peut soit aller vers une plus grande tolérance, soit vers radicalisation plus prononcée.

Dans le sens de la tolérance, on peut considérer le cas des tunisiens de confession juive. Ils naissent en Tunisie, de pères et de mères tunisiens, y vivent, mais un tunisien de confession juive ne peut pas devenir président parce qu'il n'est pas musulman. On peut aussi penser que sans budget pour la religion, certaines mosquées devront fermer, que l'argent des contribuables ne sponsorisera pas le pèlerinage des musulmans. Certains pourront même rêver que les maisons closes à la Mme Claude remplaceront les Abdallah Gueche & Cie,...

Dans le sens de la radicalisation, on peut imaginer 4 épouses, plus d'alcool, la résolution de toutes les problématiques de l'emploi par l'interdiction du travail des femmes, l'expulsion des tunisiens de confession juifs et la redistribution de leurs avoirs, l'obligation du port du voile, le pélerinage gratuit...

Ce qui est sûr, c'est que dans l'un ou l'autre cas, ce ne sont pas la partisans obscurantistes qui manquent. Ce qui est sûr, aussi, c'est que pour remettre en perspective le curseur de notre laïcité, le moment est mal choisi. Simplement, parce que rajouter cette considération au spectre de nos réflexions, ne fait que diluer l'attention que nous porterions sur des sujets autrement plus urgents : emploi, pauvreté, abus de pouvoir, corruption. Nous avons besoins d'une nouvelle vision pour un pays qui n'aspire qu'à renaître, mais où on ne continue qu'à courir derrière nos propres démons.

Dans une démocratie on a le droit et on peut parler de tout. Dans une situation d'urgence, on commence par les priorités. On peut torturer la laïcité, doper le parlement, s’asseoir sur les droits de la Femme, rebaptiser nos rues,... On peut même changer la couleur du drapeau, le nom de la capitale, l'adresse du ministère de l'intérieur, partir en guerre contre Kaddafi, insulter des diplomates... Ce ne sont pas les batailles qui manquent. A tout entreprendre en même temps, on finira par ne rien voir aboutir.

Qu'est ce qui selon toi est le plus urgent ?

mardi 1 février 2011

C'est quoi la démocratie ?

Je m'en souviens encore, quand, pour m'expliquer la démocratie, on m'a dit que c'était demos + cratos = gouvernement du peuple. Ca m'avait semblé joli.
A voir ce qui se passe, ce qui se dit, force est de constater qu'on en est plus loin que du temps de Ben Ali.

Nous vivons aujourd'hui en pleine schizophrénie. Chacun s'autoproclame juge, et invite les autres à se rendre justice. On condamne des gens sur des présomptions, en oubliant, que ce qui fonde notre humanité, c'est le droit à la dignité. La délation est devenue simple comme bonjour, la diffamation un élan nationaliste, qui trouve partout un echo.
On n'a plus de soucis pour généraliser. Si un policier fait une bavure, on demande la peau d'un ministère. Si un barbu giffle une femme, on fustige l'islamisme. Si un voleur est repéré, on crie sur tous les toits, que les milices du RCD sont de retour.

Je ne cautionne pas, et je ne cautionnerai jamais aucune enfreinte, aucun dépassement, aucun contournement de la loi, de la liberté, de la dignité. Mais que la démocratie soit le gouvernement du peuple, ne signifie pas que nous sommes tous en position de gouverner, mais juste en droit d'y prétendre, et dans le respect de cette démocratie, en droit de nous faire entendre.

Les coupables sont là, tout autour de nous, parmis nous. Il ne faut pas les oublier. Mais ça ne nous avance à rien de célébrer le chaos. Aujourd'hui, plus que jamais, on a un devoir d'exemple. Un devoir d'exemple pour ceux qui sont morts, pour ceux qui ont vécu, pour ceux qui vivent et pour ceux qui vivront.

Nous sommes, dans une phase formidable, où en découvre pour la première fois, qu'on n'a pas à baisser les yeux, qu'on n'a pas à avoir peur, qu'ensemble on peut forcer le destin. Nous sommes dans une étape formidable, où, même s'il y a encore beaucoup de choses à démolir, à raser, il y a encore beaucoup plus de choses à construire, de belles choses.

Célébrer nos douleurs, ne pansera ni nos blessures ni les cicatrices du passé. Se jeter des pierres ne nous bâtira pas un lendemain meilleur. Avons-nous déjà oublié nos idéaux ou en avons nous jamais eu ? Ne sommes nous pas entrain de perpétuer la même philosophie totalitaire qui nous a si longtemps oppressés sans nous offrir d'alternative. Quelle alternative sommes-nous entrain d'offrir aujourd'hui ?

Il y a, et il y auras toujours des ripoux, des corrompus, des voleurs, des criminels, des meurtriers, des menteurs, et tout ce qu'il peut y avoir de plus abjecte dans une société. La démocratie c'est aussi d'accepter ces aberrations sans s'ériger en juge de la bonne citoyenneté, habile défenseur des rumeurs et des calomnies et porte parole d'une paranoïa. La démocratie, avant d'être un acquis, salutaire, est un devoir.

Danser l'anarchie aujourd'hui c'est cracher dans la soupe. Parce que la démocratie c'est avant tout ce que nous en faisons.

mercredi 26 janvier 2011

Devons-nous soutenir le gouvernement Ganouchi ?

Nous voulons tous retrouver nos vies d'avant. Rigoler, sortir, voir nos amis, partir en week-end, aller au resto,... Seulement voilà, ça n'arrive pas.
Le problème est que d'une part, on a le gouvernement Ganouchi, qui est formé, solide et solidaire et qui essaie de travailler pour nous redonner nos vies. De l'autre, il y a tout ceux qui demandent la démission de ce gouvernement.

Que fait le gouvernement Ganouchi ? Il prépare et met en oeuvre la transition vers ce pourquoi le peuple tunisien a été dans la rue et y a été de son sang.

A mon avis, ce gouvernement a plusieurs urgences :
1- Laver le linge sale, et il doit y en avoir vraiment beaucoup pour demander plusieurs anciens ministres. Ce n'est pas pour dire que tous les anciens ministres sont là pour laver le linge sale. Il est certain, que certains, s'occuperont d'autres tâches. Toujours est-il que, sauf à croire au père Noël, c'est beaucoup de travail et qui ne peut pas être bâclé,
2- Créer les présidentiables. A l'issue de cette phase de transition, des élections présidentielles transparentes devraient avoir lieu. Le mieux est que, le futur président, ne soit pas en complète rupture avec l'ancienne manière de fonctionner, que ce ne soit pas un révolutionnaire, un radical, ou, pire encore, un islamiste. Il a besoin de préparer sa compagne, et aujourd'hui, en Tunisie, force est de constater qu'aucun ne dispose des fonds ni de l'assise nécessaire pour le faire,
3- Remettre l'économie en marche, parce que, nonobstant tout ce qui a été volé, et tout ce qui continuera à l'être, le coût de la paralysie économique est nécessairement supérieur, et ne profite à personne,
2598- Réforme juridique et constitutionnelle pour corriger les textes qui régissent la vie politique en Tunisie,

Non mais, soyons sérieux, qui voudrait s'opposer à ce programme ? Personne n'y perd et tout le monde y gagne. En fait, les seuls qui pourraient y perdre, sont ceux qui aspirent à la présidence et qui ne font pas partie de ce gouvernement, ils ne sont pas légion, mais disposent forcement d'adeptes, capables de rallier les foules.

Reste un point important : le prix du sang. Quand le peuple se soulève, sa soif exige la vengeance, une vengeance, qui, dans les livres d'histoire, a toujours été barbare. On a donc jeté aux loups, Ben Ali, Leila & Co. Il y a eu ensuite Soriati, Ben Dhia, Kallel, Abdallah et la liste est encore longue mais jalousement gardée entre le ministère de l'intérieur et celui de la justice.

Seulement voilà, des gens sont encore dans la rue pour demander la dissolution du gouvernement. Qui sont ces gens ?

Entres chômeurs titulaires et ascendants d'une longue lignée de chômeurs, c'est les gens à qui on a toujours menti et qui ne nous font plus confiance. Ce sont ceux qui dans notre pays n'ont plus rien à perdre, et qu'on a toujours oubliés.
On leur a menti parce que, pendant 23 ans, on leur a dit tout va bien, tout finira par s'arranger pour vous.
On leur a menti parce qu'on leur a dit, après qu'ils se soient soulevés, après qu'ils aient payés de leurs vies le tribu de la chute de Ben Ali, qu'ils ont gagné et qu'il n'y a plus rien à faire, qu'ils doivent rester chez eux.
Seulement voilà, Chez eux, rien n'a changé et ils sont aujourd'hui persuadés que pour trouvé un travail, une vie, il fallait exiger la démission du gouvernement Ganouchi, seule garantie de non retour au pouvoir de la politique à la Ben Ali.

Ces gens ça aurait pu être toi, ou moi. Ces gens, nous leurs sommes redevables de ce soulèvement. Ces gens nous leurs devons, de ne plus jamais les laisser tomber.

Devons-nous donc soutenir le gouvernement Ganouchi ? Ca dépends de ce que nous voulons : se contenter du départ de Ben Ali ou continuer à faire le ménage. Ce qui est bien dans la démocratie, c'est que même quand le peuple se trompe, le peuple a raison. Mais sommes nous prêts a écouter la volonté du peuple ?

Le modèle Ben Ali

M. Ben Ali, a gouverné la Tunisie pendant 23 ans.
Sa philosophie était on ne peut plus simple : Oubliez vos libertés, je vous promet la croissance.
Ce modèle, il faut l'avouer a très bien fonctionné. Beaucoup de personnes y ont trouvé leurs comptes, et poussé cette petite philosophie, dans un élan on ne peut plus nationaliste, à son extrême.
Et ça a fonctionné. Pendant 23 ans ça a fonctionné. Et ça pouvait fonctionnait encore, même après Ben Ali. La chute de Ben Ali a été encore plus surprenante pour ceux qui en ont été les acteurs que pour Ben Ali lui même et les amis de la Tunisie. Seulement voilà, le modèle Ben Ali, ce n'est pas simplement Ben Ali, Leila & Co. C'est toute une bonne partie de la population active qui exerce le pouvoir à la lumière des directives de Carthage et qui s'en tire très très bien. Ce n'est pas tout le gouvernement. Ce n'est pas tout le RCD. Ce ne sont pas tous ceux qui ont des porches, des Ferrari ou des Lamborghini. Et c'est d'ailleurs là tout le danger : On ne saura pas précisément qui ils sont. C'est juste l'héritage de Ben Ali.
Force est de se dire, que l'héritage de Ben Ali est encore au pouvoir, et sauf à être naïf, qu'il n'est pas très disposée à y renoncer. De tous les instincts humains, l'instinct de survie est le plus fort.

Que voulons-nous pour la censure ?

Comme beaucoup de monde, j'ai suivi, hier sur Mosaique FM, une émission autour du problème de la censure en Tunisie.
L'état actuel des choses, est que, désormais, on peut aller sur Youtube, Dailymotion, et beaucoup d'autres sites, qu'on ne pouvait pas, auparavant, sans ruses visiter. Mieux encore, pour les sites, qu'on n'est pas autorisés à visiter, on a maintenant le superbe message, en arabe, français et en anglais disant : "Le contenu de ce site porte atteinte aux bonnes mœurs ou comporte des éléments violents ou incite à la haine.
Si vous jugez le contraire, prière de contacter l'adresse suivante : contact@web-liberte.tn". Il est où le problème ?
Le problème c'est que, quand on parle de lutte contre la censure, ceci n'est pas une avancée, mais un recul. La situation est encore pire parce que :
1- Maintenant, on en accepte le principe,
2- On en accepte l'arbitraire,
3- Maintenant c'est en plus cautionnée par la jeunesse qu'on présente comme étant activiste dans la lutte contre la censure,
Le premier problème de la censure est, qu'elle existe. Elle signifie, que quelqu'un, a le droit de décider pour toi citoyen tunisien né libre, et pour les autres citoyens tunisiens, de ce que tu peux voir, et de ce que tu ne dois pas voir. Ca a été le cas avant le 14 janvier, et on a tous vu la dérive dans laquelle on a été, l'abus qui en a été fait.
Dans un pays démocratique, idéologie pour laquelle, si je me souviens bien, des tunisiens sont morts, le principe, est qu'il n'y a pas de censure. Tous le monde a accès a tout. Dans les cas exceptionnels où on trouverait un site posant problème pour incitation à la violence, à la haine raciale, ou autre (encore faut-il préciser sans nul doute possible ce que ça veut dire), une justice indépendante serait appelée à statuer, pour que ce qui est adéquat se fasse .
A l'inverse, on nous explique, que sous couvert de protection contre la pornographie, la censure est un besoin vital de la société. Ce a quoi, la réponse est on ne peut plus banale :
1- Pourquoi est ce que un citoyen tunisien aurait besoin d'être protégé, là où un citoyen français, n'a pas besoin de l'être ? Nous devons être tous particulièrement stupides, et ça doit être génétique ! En fait quand tu es tunisien, tu ne peux pas savoir ce qui est bon pour toi ! Après tout, Ben Ali avait raison !
2- Qu'est ce qui a été fait, pour éviter une nouvelle dérive, de ceux qui, derrière leurs écrans, et dont la loyauté, n'est pas pour le citoyen, mais pour ceux à qui la censure a pu, peut, et pourra encore profiter ?

C'est triste, mais ça ne fait que renforcer la présomption, que la liberté, est encore loin d'être née.