mercredi 26 janvier 2011

Devons-nous soutenir le gouvernement Ganouchi ?

Nous voulons tous retrouver nos vies d'avant. Rigoler, sortir, voir nos amis, partir en week-end, aller au resto,... Seulement voilà, ça n'arrive pas.
Le problème est que d'une part, on a le gouvernement Ganouchi, qui est formé, solide et solidaire et qui essaie de travailler pour nous redonner nos vies. De l'autre, il y a tout ceux qui demandent la démission de ce gouvernement.

Que fait le gouvernement Ganouchi ? Il prépare et met en oeuvre la transition vers ce pourquoi le peuple tunisien a été dans la rue et y a été de son sang.

A mon avis, ce gouvernement a plusieurs urgences :
1- Laver le linge sale, et il doit y en avoir vraiment beaucoup pour demander plusieurs anciens ministres. Ce n'est pas pour dire que tous les anciens ministres sont là pour laver le linge sale. Il est certain, que certains, s'occuperont d'autres tâches. Toujours est-il que, sauf à croire au père Noël, c'est beaucoup de travail et qui ne peut pas être bâclé,
2- Créer les présidentiables. A l'issue de cette phase de transition, des élections présidentielles transparentes devraient avoir lieu. Le mieux est que, le futur président, ne soit pas en complète rupture avec l'ancienne manière de fonctionner, que ce ne soit pas un révolutionnaire, un radical, ou, pire encore, un islamiste. Il a besoin de préparer sa compagne, et aujourd'hui, en Tunisie, force est de constater qu'aucun ne dispose des fonds ni de l'assise nécessaire pour le faire,
3- Remettre l'économie en marche, parce que, nonobstant tout ce qui a été volé, et tout ce qui continuera à l'être, le coût de la paralysie économique est nécessairement supérieur, et ne profite à personne,
2598- Réforme juridique et constitutionnelle pour corriger les textes qui régissent la vie politique en Tunisie,

Non mais, soyons sérieux, qui voudrait s'opposer à ce programme ? Personne n'y perd et tout le monde y gagne. En fait, les seuls qui pourraient y perdre, sont ceux qui aspirent à la présidence et qui ne font pas partie de ce gouvernement, ils ne sont pas légion, mais disposent forcement d'adeptes, capables de rallier les foules.

Reste un point important : le prix du sang. Quand le peuple se soulève, sa soif exige la vengeance, une vengeance, qui, dans les livres d'histoire, a toujours été barbare. On a donc jeté aux loups, Ben Ali, Leila & Co. Il y a eu ensuite Soriati, Ben Dhia, Kallel, Abdallah et la liste est encore longue mais jalousement gardée entre le ministère de l'intérieur et celui de la justice.

Seulement voilà, des gens sont encore dans la rue pour demander la dissolution du gouvernement. Qui sont ces gens ?

Entres chômeurs titulaires et ascendants d'une longue lignée de chômeurs, c'est les gens à qui on a toujours menti et qui ne nous font plus confiance. Ce sont ceux qui dans notre pays n'ont plus rien à perdre, et qu'on a toujours oubliés.
On leur a menti parce que, pendant 23 ans, on leur a dit tout va bien, tout finira par s'arranger pour vous.
On leur a menti parce qu'on leur a dit, après qu'ils se soient soulevés, après qu'ils aient payés de leurs vies le tribu de la chute de Ben Ali, qu'ils ont gagné et qu'il n'y a plus rien à faire, qu'ils doivent rester chez eux.
Seulement voilà, Chez eux, rien n'a changé et ils sont aujourd'hui persuadés que pour trouvé un travail, une vie, il fallait exiger la démission du gouvernement Ganouchi, seule garantie de non retour au pouvoir de la politique à la Ben Ali.

Ces gens ça aurait pu être toi, ou moi. Ces gens, nous leurs sommes redevables de ce soulèvement. Ces gens nous leurs devons, de ne plus jamais les laisser tomber.

Devons-nous donc soutenir le gouvernement Ganouchi ? Ca dépends de ce que nous voulons : se contenter du départ de Ben Ali ou continuer à faire le ménage. Ce qui est bien dans la démocratie, c'est que même quand le peuple se trompe, le peuple a raison. Mais sommes nous prêts a écouter la volonté du peuple ?

Le modèle Ben Ali

M. Ben Ali, a gouverné la Tunisie pendant 23 ans.
Sa philosophie était on ne peut plus simple : Oubliez vos libertés, je vous promet la croissance.
Ce modèle, il faut l'avouer a très bien fonctionné. Beaucoup de personnes y ont trouvé leurs comptes, et poussé cette petite philosophie, dans un élan on ne peut plus nationaliste, à son extrême.
Et ça a fonctionné. Pendant 23 ans ça a fonctionné. Et ça pouvait fonctionnait encore, même après Ben Ali. La chute de Ben Ali a été encore plus surprenante pour ceux qui en ont été les acteurs que pour Ben Ali lui même et les amis de la Tunisie. Seulement voilà, le modèle Ben Ali, ce n'est pas simplement Ben Ali, Leila & Co. C'est toute une bonne partie de la population active qui exerce le pouvoir à la lumière des directives de Carthage et qui s'en tire très très bien. Ce n'est pas tout le gouvernement. Ce n'est pas tout le RCD. Ce ne sont pas tous ceux qui ont des porches, des Ferrari ou des Lamborghini. Et c'est d'ailleurs là tout le danger : On ne saura pas précisément qui ils sont. C'est juste l'héritage de Ben Ali.
Force est de se dire, que l'héritage de Ben Ali est encore au pouvoir, et sauf à être naïf, qu'il n'est pas très disposée à y renoncer. De tous les instincts humains, l'instinct de survie est le plus fort.

Que voulons-nous pour la censure ?

Comme beaucoup de monde, j'ai suivi, hier sur Mosaique FM, une émission autour du problème de la censure en Tunisie.
L'état actuel des choses, est que, désormais, on peut aller sur Youtube, Dailymotion, et beaucoup d'autres sites, qu'on ne pouvait pas, auparavant, sans ruses visiter. Mieux encore, pour les sites, qu'on n'est pas autorisés à visiter, on a maintenant le superbe message, en arabe, français et en anglais disant : "Le contenu de ce site porte atteinte aux bonnes mœurs ou comporte des éléments violents ou incite à la haine.
Si vous jugez le contraire, prière de contacter l'adresse suivante : contact@web-liberte.tn". Il est où le problème ?
Le problème c'est que, quand on parle de lutte contre la censure, ceci n'est pas une avancée, mais un recul. La situation est encore pire parce que :
1- Maintenant, on en accepte le principe,
2- On en accepte l'arbitraire,
3- Maintenant c'est en plus cautionnée par la jeunesse qu'on présente comme étant activiste dans la lutte contre la censure,
Le premier problème de la censure est, qu'elle existe. Elle signifie, que quelqu'un, a le droit de décider pour toi citoyen tunisien né libre, et pour les autres citoyens tunisiens, de ce que tu peux voir, et de ce que tu ne dois pas voir. Ca a été le cas avant le 14 janvier, et on a tous vu la dérive dans laquelle on a été, l'abus qui en a été fait.
Dans un pays démocratique, idéologie pour laquelle, si je me souviens bien, des tunisiens sont morts, le principe, est qu'il n'y a pas de censure. Tous le monde a accès a tout. Dans les cas exceptionnels où on trouverait un site posant problème pour incitation à la violence, à la haine raciale, ou autre (encore faut-il préciser sans nul doute possible ce que ça veut dire), une justice indépendante serait appelée à statuer, pour que ce qui est adéquat se fasse .
A l'inverse, on nous explique, que sous couvert de protection contre la pornographie, la censure est un besoin vital de la société. Ce a quoi, la réponse est on ne peut plus banale :
1- Pourquoi est ce que un citoyen tunisien aurait besoin d'être protégé, là où un citoyen français, n'a pas besoin de l'être ? Nous devons être tous particulièrement stupides, et ça doit être génétique ! En fait quand tu es tunisien, tu ne peux pas savoir ce qui est bon pour toi ! Après tout, Ben Ali avait raison !
2- Qu'est ce qui a été fait, pour éviter une nouvelle dérive, de ceux qui, derrière leurs écrans, et dont la loyauté, n'est pas pour le citoyen, mais pour ceux à qui la censure a pu, peut, et pourra encore profiter ?

C'est triste, mais ça ne fait que renforcer la présomption, que la liberté, est encore loin d'être née.